Stratégie et théorie des jeux

Ce topic est dédié à la description, la formalisation et la résolution de situations potentiellement réelles pouvant être décrites, notamment par la théorie des jeux.
Ce sont autant de voies permettant d'accéder au statut de maître des jeux (Yugi-ooooohhhh !!! ).


Commençons par un classique : le dilemme du prisonnier.
Il s'agit d'un jeu synchrone à somme non-nulle entre deux joueurs en coopétition (pour ceux que le vocabulaire associé intéresse... mais cela n'est pas important pour comprendre cet exemple, je reviendrai sur le vocabulaire plus tard).
Deux prisonniers (éventuellement complices et accusés de meurtre) sont bâillonnés et placés dans une salle où un juge (d'un pays étrange... le même que celui du problème des douze prisonniers) leur fait la proposition suivante :
1) Si l'un dénonce l'autre et que l'autre ne le fait pas, celui qui a dénoncé se voit gracié et l'autre sera incarcéré pendant 5 ans.
2) Si aucun ne dénonce l'autre, ils seront emprisonnés tous les deux pendant 2 ans.
3) Si les deux dénoncent l'autre, ils seront prisonniers 4 ans tous les deux.
4) Les prisonniers auront droit s'ils le souhaitent à un changement d'identité à leur sortie de prison, pour éviter la honte publique ou l'éventuel vengeance de l'autre.
(les durées sont là pour donner une idée, il est possible de les changer pour modifier l'équilibre...)
Ainsi, les deux prisonniers savent que l'autre a également eu cette offre mais ne peuvent communiquer. Ensuite, ils se voient conduits dans des cellules séparées. Ils ont une heure pour se décider et peuvent durant cette heure appeler le juge pour dénoncer l'autre.

Cette situation permet de tester la confiance que s'accordent deux personnes.
Voici ce qui peut traverser la tête d'un prisonnier pendant cette heure décisive :
Si les deux dénoncent l'autre, ils seront emprisonnés tous les deux pendant 4 ans, ce qui fait 8 ans d'emprisonnement.
Si un seul dénonce l'autre, l'un sera emprisonné pendant 5 ans et pas l'autre, ce qui fait 5 ans d'emprisonnement.
Si personne ne dénonce l'autre, ils seront emprisonnés tous les deux pendant 2 ans, ce qui fait 4 ans d'emprisonnement.
Ainsi, il semblerait que la meilleure solution soit de ne pas dénoncer l'autre, car si l'autre fait de même cela fera le moins d'emprisonnement pour les deux.
Mais si l'autre pense de même, il y a moyen de sauver sa peau... car si l'autre ne dénonce pas notre prisonnier, ce dernier peut le dénoncer pour être libéré immédiatement.
Le problème est que cette solution paraît bien tentante pour l'autre prisonnier, aussi notre prisonnier peut se demander si l'autre ne vas le trahir... et dans ce cas de figure, il vaut mieux qu'il le trahisse à son tour pour rester 4 ans en prison au lieu de 5.
Evidemment, ainsi, il arrive à la pire solution pour le groupe, qui est de 8 ans d'emprisonnement au total.
Sachant cela, il peut revenir sur sa décision, mais que faire ?

Et bah il n'a qu'a se dénoncer lui-même ...

Soit, dans ce cas, je modifie les closes : il est possible de se dénoncer au lieu de dénoncer l'autre.

C'est peut-être une solution intéressante... se sacrifier pour les autres. Mais si l'autre fait de même ? Dans ce cas, au lieu qu'un seul soit enfermé 5 ans, les deux seront enfermés 4 ans.

De plus, c'est une solution qui va à l'encontre des intérêts du prisonnier... n'est-ce pas solution naïve ?

Ca dépend quels sont les intérêts du prisonnier ... Pour ma part je ne dénoncerais jamais quelqu'un de mon plein gré (surtout s'il est innocent)... Et je pourrais très bien me dénoncer si je suis coupable ... Non pas pour réduire ma peine mais pour assumer les conséquence de mes actes ... Tu vois que les intérêts du prisonnier peuvent être variables ...

Oh, je pourrai évidemment mettre 50, 20 ou 40 ans à la place de 5, 2 ou 4 ans pour les peines.
Donc, si j'ai bien suivi ton raisonnement, tu accepterais la peine quelle qu'elle soit et même si c'est contraire à tes intérêts... Donc au final, que la peine soit d'un siècle ou d'un an t'est égal ? Et si c'était une peine de mort ?

De plus, l'histoire ne dit pas s'ils sont innocents, et d'ailleurs ce n'est pas le problème.

Cela dépend des deux personnes. On ne peux pas vraiment dire comme ça sans mettre deux personnes en exemple.

Par exemple je pense que que je pourrai dénoncer certaines personnes parce que je sais qu'ils me dénonceront et que donc c'est dans mon intéret de les dénoncer. Surtout si cette personne se trouve être le vrai coupable.

Prenons deux cas :

1) Vous êtes complices et coupables tous les deux
2) Vous êtes des étrangers l'un pour l'autre et tu sais que tu es innocente

Je suis encore assez jeune pour mourrir pour des idéaux ... Mais s'il y en a une, je prendrais la solution qui évite à coup sûr que quelqu'un soit tué.

Dans la situation 1 je me dénonce (ou je dénonce l'autre si je le déteste).
Dans la situation 2 je ne dénonce personne car je ne connais la culpabilité de personne.

Oh, Elrohir, tu n'as peut-être pas remarqué, mais d'après ce que j'ai dit, si tu te dénonces et qu'il te dénonce (ou qu'il dénonce), vous tombez dans le pire cas car vous avez tous les deux dénoncé quelqu'un.

Comme vous êtes sentimentaux, plaçons-nous sur la scène internationale.
Deux pays doivent se mettre d'accord sur leur relation commerciale, ce qui influencera leurs bénéfices.
Si les deux choisissent le libre-échange, ils augmentent de 10% chacun leur bénéfices.
Si l'un choisit le libre-échange et l'autre le protectionnisme, celui qui aura ouvert ses barrières douanières perdra 10% de bénéfices, et celui qui aura favorisé ses entreprises aura un bénéfice augmenté de 20%.
Si les deux décident de fermer leurs frontières, ils limitent le commerce et perdent chacun 5% de bénéfices.

	Libre-échange	Protectionnisme
Libre-échange	+10/+10	-10/+20
Protectionnisme	+20/-10	-5/-5

Il est clair qu'un pays a intérêt de mettre en protectionnisme s'il connaît la décision de l'autre.
En effet, ou bien l'autre est en libre-échange et alors le bénéfice est de 20 au lieu de 10, ou bien l'autre est en protectionnisme et la perte est de 5 au lieu de 10.
Il est également clair que si les deux le font, ils arrivent à -5% tous les deux, alors que s'ils coopéraient ils pourraient avoir +10% chacun.
Les ambassadeurs peuvent communiquer, mais la décision ne sera prise qu'une fois que les ambassadeurs auront regagné leurs capitales respectives, ce qui signifie évidemment que le gouvernement peut choisir de ne pas appliquer une éventuelle décision prise conjointement par les ambassadeurs.

Que se passera-t-il au premier tour ?

Maintenant, imaginons que ce ne soit pas des pourcentages par rapport aux capitaux présents, mais des parts du marché, considéré comme constant (pour éviter les blagues style faire +20% puis -20% ne ramène pas à 100%).
Imaginons qu'ils se mettent d'accord pour un mois seulement, et qu'ils peuvent réitérer le processus tous les mois (dilemme du prisonnier répété). Y a-t-il une stratégie gagnante ?