A propos de l'obéissance

On est obéissant parce qu'on est seul face à un système, parce qu'on est sans défense. Pour nous protéger nous nous programmons nous-mêmes pour passer l'épreuve et passons en mode automatique, nous nous faisons happer par la situation. Dans cet état, les prétextes ne manquent pas pour continuer : parce que nous nous sommes engagés, parce que ce n'est pas nous qui sommes responsables ou habilités à juger. Mais pourtant à l'arrière-plan nos valeurs essaient de se manifester, et nous sommes mal à l'aise. En essayant de relâcher cette tension, en l'extériorisant (ici par le rire) ou en cherchant des compromis (ici par la triche) nous ne faisons qu'abandonner ces valeurs. Et en fuyant la source de cette tension (ici en ignorant la victime) on s'oublie pour de bon, et on ne veut que mettre fin à la tâche en cours. On s'aveugle soi-même, et les injonctions de l'autorité ne sont que des consolidations de plus en plus fortes de cet aveuglement. Peut-on réussir à s'écouter suffisamment (ou son partenaire) pour aller à l'encontre de la pression de l'autorité ou du public ? Comment apprendre à ne plus s'aveugler de la sorte, à ne pas se travestir ou s'oublier, et ce sans être à ce point dévasté par ce combat intérieur ? L'expérience personnelle, des convictions profondes, une grande sensibilité, une habitude de la remise en question semblent aider.

Cette vidéo fournit un complément d'information (wiki : Expérience de Stanford), mais attention les sous-titres ont tendance à perdre la synchronisation. Cliquez sur la barre où vous en êtes quand ça arrive et il rechargera la vidéo comme il faut.

Zimbardo promeut l'héroïsme comme contre-poison : penser qu'on est un héros en devenir, cultiver sa différence, ne pas hésiter à agir quand les autres sont passifs, agir non pas dans son intérêt mais dans l'intérêt de tous.

Enfin, l'article sur l'expérience de Rosenhan (mettant en doute l'efficacité des hôpitaux psychiatriques) est également intéressant.

Avec l'obéissance, il y a aussi la passivité je trouve. Cette manie de mettre son cerveau sur pause en se disant des choses comme : tout ira bien, je ne peux pas y croire, personne n'en saura rien. Alors c'est un mélange de flemme et de soumission. On m'a appris depuis que je suis petite que le chemin le plus facile c'est toujours celui qui mène à l'enfer. Je pense que c'est bien de ça qu'il s'agit : la faculté de l'être humain à ne pas agir. A déléguer la responsabilité de ces actes, de la puissance de son ressentit : tu sais que c'est mal, mais pour changer il faudrait se lever, il faudrait se démarquer, il faudrait aller au devant d'un affrontement, alors que c'est tellement plus facile de fermer les yeux, de hausser les épaules, de se vider l'esprit et de continuer mécaniquement à faire ou à ne rien faire.
J'ai réfléchis à certaines circonstances de la vie de tout les jours, bien moins extrêmes que le jeu, où l'on peut-être confronté à cette nécessitée de réagir. Et en y repensant je me rappel de l'effort que c'était ! La quasi violence qu'on doit se faire pour dire non, pour se lever, pour repousser ! Même, et c'est sans doute le plus effrayant, face à des choses qui nous mettent en situation de malaise ou qui risquent de blesser quelqu'un d'autre. Je me demande si ce mécanisme de passivité est en nous par nature, où si c'est à force de compromis pour pouvoir vivre avec les autres qu'on a fini par l'intégrer à ce point en nous. Après avoir vu la vidéo, j'avais deux espérances : j'espère que j'aurais su m'arrêter et j'espère que je saurais transmettre les bonnes choses à mes enfants pour qu'ils y arrivent également.

Le débat semble intéressant mais la vidéo à l'origine de celui-ci est trop longue pour ma patience. Serait-il possible d'avoir un résumé s'il vous plait ? .

Il s'agit de l'expérience de Milgram répétée sous une forme plus moderne. Au lieu que ce soit un scientifique qui serve d'autorité dans le cadre d'une expérience sur la mémoire c'est une présentatrice télé dans le cadre du jeu télé "La zone extrême" où le candidat observé donne des décharges électriques croissantes quand le faux candidat se trompe. Au final environ 80% des candidats finissent par donner l'équivalent d'une décharge mortelle à la fin du jeu. La vidéo détaille les tenants et aboutissants de l'expérience avec des extraits, et explique les mécanismes psychologiques à l’œuvre.